Fiscalité : une année pleine de promesses pour les PME et les start-ups

Fiscalité 2014 par Isabelle Vendeville

 

Alors que l’on se souvient encore du mouvement des Pigeons d’octobre 2012, les entrepreneurs français ont été entendu par le Gouvernement et semblent désormais mieux compris. Mieux encore, l’exécutif semble vouloir aller dans leur sens afin de développer l’un des moteurs de l’économie française que sont les PME.

Depuis un peu plus d’un an, un environnement favorable aux entrepreneurs se construit en France. Les aides de toutes sortes, telles que le crédit d’impôt recherche, les FCPI, la création de la BPI (avec une force de frappe de 42 milliards d’euros) en témoignent. Les souscriptions dites TEPA ont été maintenues et il ne semble pas à l’ordre du jour de les remettre en cause. Rappelons quela réduction TEPA s’élève à 50% des montants investis pour l’ISF, et 18% pour l’IRPP.

Malgré l’existence de liquidités et l’évolution du droit, les investisseurs restent frileux en raison notamment de l’instabilité fiscale.

C’est dans un but de contrer cette frilosité que les lois de finances votées fin 2013 prévoient de nouvelles mesures favorables : une refonte de l’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières allant dans le sens d’un allègement et d’une simplification (1.) ; le maintien du régime de l’exonération d’impôt sur les bénéfices applicable aux jeunes entreprises innovantes jusque 2016 (2.) ; la création d’un nouveau PEA destiné à financer les PME et les ETI (3.) ; et la mise en place, sous réserve de sa validation par la Commission européenne, d’un amortissement exceptionnel en cas d’investissement dans le capital d’une PME innovante (4.).

 

1. Réforme de l’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières (Art. 19 de la loi de finances pour 2014)

Fer de lance du mouvement des Pigeons, la taxation des plus-values de cession de valeur mobilière a été profondément revue.

On craignait que l’imposition à 60% condamnée vigoureusement par les Pigeons soit maintenue. Il faut rappeler en effet qu’il avait été prévu, dans le cadre de l’alignement du capital et du travail, de taxer les plus-values à l’IRPP au taux de 45% pour la tranche la plus élevée auquel s’ajoutait les prélèvements sociaux. Le texte a été retiré, et un nouveau texte bien plus conciliant a été voté.

Le nouveau régime mis en place par la loi de finance pour 2014 est beaucoup plusfavorable.

Le principe d’une imposition au barème de l’impôt sur le revenu est confirmé, et les abattements pour durée de détention ainsi que les régimes dérogatoires sont modifiés.

La plus-value bénéficie en principe d’un abattement pour durée de détention (non applicable aux prélèvements sociaux) de :

– 50% entre 2 ans et 8 ans de détention, soit un taux global d’imposition de la plus-value (IR au taux marginal + Prélèvements sociaux) de 38%, et
– un abattement de 65% après 8 ans de détention soit une imposition globale de 31,125%
Un régime plus favorable prévoit, sous certaines conditions, l’application d’un abattement dérogatoire en cas de :
– cessions de titres de PME (titres souscrits dans les 10 ans de la création de la PME) ;
– cessions de participation au sein du groupe familial (remplace l’ancienne exonération) ;
– cessions effectuées par des dirigeants partant à la retraite (remplace l’ancien régime), pour lesquelles un abattement supplémentaire fixe de 500 000 € sur le gain net est applicable.

Cet abattement dérogatoire est de :

– 50% entre 2 ans et 4 ans de détention, soit un taux d’impôt global de la plus-value (IR + Prélèvements sociaux) de 38%,
– 65% entre 4 et 8 ans de détention soit une imposition globale de 31,125%,
– 85% au-delà de 8 ans de détention soit une imposition globale de 22,25%.

Au final, l’application de ces abattements pour durée de détention permet d’une part d’unifier le régime d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières, et d’autre part de diminuer l’imposition finale de ces plus-values.

 

2. Le régime d’exonération d’impôt sur les bénéfices applicable aux jeunes entreprises innovantes est prorogé en faveur des entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2016

Le régime permet aux jeunes entreprises innovantes réalisant des projets de recherche et de développement, de bénéficier sous certaines conditions d’une exonération totale d’impôt sur les bénéfices pendant un an, suivi d’un abattement de 50% du même impôt pendant une nouvelle période d’un an (art. 44 sexies A du CGI).

A cela s’ajoute une exonération facultative en matière d’impôts locaux, accordée sur délibération des collectivités territoriales, pour une durée de 7 ans.
Ce régime s’appliquait pour les jeunes entreprises innovantes créées jusqu’au 31 décembre 2013, eta été prolongé en faveur des entreprises créées jusqu’au 31 décembre 2016.

 

3. Création d’un nouveau PEA, le « PEA-PME », destiné à financer les PME et les ETI (Art. 70 de la loi de finances pour 2014).

Toujours dans l’optique d’inciter les investissements dans les PME et ETI, le Gouvernement a mis en place ce nouveau PEA en complément du PEA classique déjà existant.

Le PEA-PME bénéficie des mêmes avantages fiscaux que le PEA classique. Il est limité à un plafond de 75 000 € (150 000 € pour un couple) et peut être souscrit en supplément d’un PEA « classique ».

Les titres éligibles au PEA-PME sont notamment les actions ou certificats d’investissement de société et les certificats coopératifs d’investissement, oules parts de SARL ou de société dotées d’un statut équivalent.

Le gouvernement va dans le sens de la défensedes entreprises françaises en mettant ici l’accent sur les PME-ETI qui représentent près de 99% des entreprises françaises.

 

4. Amortissement exceptionnel des investissements dans le capital des PME innovantes (Art. 15 de la loi de finances rectificative pour 2013)

Le gouvernement a souhaité favoriser le financement des PME innovantes par la mise en place d’un dispositif d’incitation au capital investissement d’entreprises.

Cette mesure est une des mesures les plus favorables et les plus incitatives. Elle n’entrera cependant en vigueur qu’après publication d’un décret qui devra intervenir après validation par la Commission européenne, qui peut intervenir dans un délai de 2 à 18 mois. Son avenir reste donc aujourd’hui incertain.

Les sociétés soumises à l’IS qui investissent, directement ou par l’intermédiaire d’un fonds ou d’une société d’investissement (FCPR ou FCPI ou SCR) dans des PME innovantes, pourront amortir leur investissement sur 5 ans sous certaines conditions.

Une PME innovante est :

– une PME au sens communautaire, et qui
– soit a réalisé au cours de l’exercice précédent des dépenses de recherche représentant au moins 15% deses charges déductibles (10% pour les entreprises industrielles),
– soit justifie de la création de produits, procédés ou techniques dont le caractère innovant et les perspectives de développement économique sont reconnus, ainsi que le besoin de financement correspondant.

La participation de l’entreprise au capital des PME devra cependantrester minoritaire et ne pas dépasser, directement ou indirectement, plus de 20% du capital ou des droits de vote de la PME innovante, et les prises de participation devrontêtre conservées pendant deux ans minimum.

Lorsque cette disposition entrera en vigueur, elle permettra de favoriser l’investissement dans les PME par des sociétés plus importantes et qui disposent de moyens plus importants.

Loi Tepa, Crowdfunding, venture capital

De réelles opportunités pour le développement des PME par Isabelle Vendeville

 

Les entrepreneurs ont de quoi retrouver l’espoir de faire croître leur activité en dehors du « love money » (la famille, les amis), qui était devenu la source de financement quasi-exclusive des sociétés en amorçage avant l’intervention de la loi Tepa.

 

La Loi Tepa …

En 2007, des incitatifs fiscaux ont été proposés aux investisseurs, particuliers, désirant souscrire au capital de PME. Les textes ont beaucoup évolué depuis, le législateur ayant eu à cœur de protéger la PME et éviter que les avantages fiscaux ne se limitent à une défiscalisation sans risque. Il a notamment été prévu que les souscriptions au capital des PME ne s’accompagnent d’aucune contrepartie ou avantage, de quelque nature que ce soit, pour le souscripteur (notamment la garantie de retrouver sa mise au terme du délai de conservation de 5 ans requis par la loi).

Aujourd’hui, en résumé, un particulier peut bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu de 18% et une réduction d’ISF de 50% (dans certaines limites et sous certaines conditions), qu’il investisse en direct, ou par l’intermédiaire d’un FCPI ou d’un FIP. Ce dispositif a permis de relancer le capital-risque, mais s’avérait insuffisant, en particulier pour les entreprises qui n’avaient pas les moyens de se faire connaître largement en dehors de leur réseau personnel.

L’exposition médiatique est cruciale pour ces start-ups, pour faciliter leurs levées de fonds, mais également faire connaître leurs produits et services et décrocher leurs premiers clients. C’est dans ce cadre que certaines initiatives, comme l’opération 3minutespourconvaincre, portée à l’antenne par bfm Business et Stéphane Soumier, s’étaient développées. Les plateformes de financement participatif se sont multipliées, d’abord dans le cadre de projets culturels, avec la possibilité pour les internautes de faire des dons pour permettre aux projets de se réaliser, sans contrepartie « spéculative » mais avec une « reconnaissance » spécifique le nom au générique, de invitations aux avants premières etc.).

Ces initiatives ont suscité un engouement sans précédent, et ont montré une réelle volonté de personnes –avec un peu de moyens- de participer à une aventure entrepreneuriale. Jusqu’alors assez « confidentiel » et finalement d’une certaine manière désintéressé, de nombreuses actions ont été menées pour développer ce mode de financement.

 

Le « Crowdfunding » ou Financement participatif …

Fleur Pellerin a annoncé vendredi 14 février une des mesures qui devraient permettre le développement du financement participatif, aujourd’hui limité par des contraintes réglementaires lourdes (capital minimum, rédaction de prospectus lourds et inadaptés pour des start-ups, sanctions pénales au titre du démarchage financier (i.e. sollicitation de non professionnels pour investir dans des entreprises qui ne font pas offre au public).

Il est proposé aujourd’hui à ces plateformes de bénéficier d’un statut particulier : Conseil en Investissement Participatif (CIP) sans minimum de fonds propres, mais avec un certain nombre d’exigence au regard de l’information communiquée aux internautes. Les PME pourront lever jusqu’à 1 million d’euros par ce biais.

Les internautes, particuliers, pourront prêter jusque 1000€ par projet. On peut regretter que ce seuil ne soit pas plus élevé, ou que ce dispositif ne soit pas agrégé avec les avantages de la loi Tepa : la PME qui aura à la fois convaincu des investisseurs entrant dans le cadre de la Loi Tepa et des internautes « anonymes » devra procéder en deux temps, et ne pourra associer les deux types d’investisseurs dans le cadre d’une même levée de fonds (puisque l’investisseur dit Tepa investit des montants supérieurs à 1000€).

Une ordonnance doit être publiée courant mars.

 

Les incitatifs fiscaux pour le « Venture capital » (les entreprises investissant dans les PME) …

Parallèlement, et sous réserve de l’avis de la Commission européenne, s’ouvrira la possibilité pour les entreprises de déduire leur investissement dans les PME innovantes, dans les conditions prévues par la loi de Finances rectificative pour 2013.

Les sociétés soumises à l’IS qui investissent, directement ou par l’intermédiaire d’un fonds ou d’une société d’investissement (FCPR ou FCPI ou SCR), dans des PME innovantes pourront amortir leur investissement sur 5 ans sous certaines conditions (notamment, la participation ne pourra excéder 20% du capital ou des droits de vote). Rappelons que jusqu’alors, les participations ne peuvent être dépréciées que par le biais d’une provision, non déductible fiscalement.

On s’écarte ici de la dimension « affective » de l’investissement mais la mesure présente d’autres avantages pour les entreprises: (i) dynamiser leur image d’entreprise citoyenne : nous sommes précisément dans l’esprit du « pacte de responsabilité » et (ii) créer des partenariats avec des sociétés innovantes, en participant à leur développement.
Nombreux sont les grands groupes qui se sont lancés dans cette voie. Cet incitatif fiscal va permettre de donner un élan supplémentaire.
Espérons que la prochaine fois, ce sera le Président américain qui rendra visite à nos pôles de compétitivité…